Nos experts : QUIET QUITTING ? Jean-Pierre Neveu, comment définir le "quiet quitting", qui semble se développer dans les entreprises ?

Nos experts :Quiet quitting?

Jean-Pierre Neveu, comment définir le "quiet quitting", qui semble se développer dans les entreprises ?

Le « quiet quitting » (littéralement, démission tranquille) est un comportement au travail de type  minimaliste. Concrètement, le salarié s’en tient à ce qu’il doit faire, ne dépasse pas l’amplitude se son horaire quotidien, et limite au strict nécessaire les interactions sociales, qu’il réserve « pour l’extérieur ». Bref, il en fait le minimum. C’est l’inverse du « présentéisme » où la personne vient au travail, même malade.

Les recherches en management permettent-elles d'expliquer ce phénomène ?

Non. Deux principales raisons à cela. D’une part, à l’origine, il s’agit d’un de ces « buzz-words », dont le monde du management est si friand. Expression lancée récemment par les consultants. Donc, à la base, rien de bien scientifique. D’autre part, c’est un phénomène. Or la recherche s’intéresse principalement aux raisons et aux processus sous-jacents amenant aux comportements observés. Elle dépasse l’anecdotique. De fait, le « quiet quitting » peut être considéré comme une des expressions de ce qui a été étudié comme de la « démission intérieure /psychologique ».

Comment les responsables RH réagissent face à ce problème ?

Ils se ruent vers les consultants qui leur servent des solutions toutes faites à des angoisses préfabriquées. En effet, qui n’a pas rencontré ces « machines à refouler le boulot » ou plus récemment « ces jeunes qui ne veulent pas travailler » ? L’avantage de ce type d’envol médiatique est qu’il évoque à chacun tout ce qu’il désire et fantasme.

De manière plus sérieuse, et certainement plus durable, il convient de rappeler certains principes. Premièrement, l’objet de la gestion des ressources humaines n’est pas de changer les personnes, mais de s’y adapter. Deuxièmement, de fait, et face aux changements (inéluctables et continuels) de son environnement, la RH doit sérieusement prendre en compte les profils motivationnels des salariés pour opérer une « rencontre » avec les attentes et les exigences des organisations. En conclusion, et quoique l’on puisse penser d’une certaine « Génération TikTok » qui serait à l’origine de ce désintérêt pour le travail, le monde de l’entreprise n’a d’autres choix que de considérer la RH comme une fonction éminemment stratégique. Ainsi, les entreprises pourront s’atteler à développer des pratiques compétentes aux niveaux recrutement, évaluation des performances, et systèmes de gratifications (individuels et  collectifs). Une forme d’investissement responsable pour des générations quelque peu désorientées, … et/ou déroutantes.